4/ Franco Luambo Makiadi
L’un des plus célèbres artistes musiciens Congolais est Franco Luambo Makiadi. Tout d’abord, le caractère satirique de sa musique, ses talents de guitaristes et sa stature imposante sont autant d’éléments ayant contribué à son succès. Et pourtant, l’artiste est non seulement autodidacte, mais un adolescent à l’époque qui s’est formé dans la rue. Né au Congo le 6 juillet 1938 Franco fait ses premiers pas dans la musique en jouant de l’harmonica puis, l’artiste devient guitariste. Ebengo Dewayon le grand frère du musicien Congolais Johnny Bokélo apprend à Luambo ses premiers accords de guitares avant qu’il ne se perfectionne auprès du Centrafricain Jimmy Zième Zakari. Ce dernier apporte à Franco un style musical alliant un mélange de la Rumba et de la musique classique que la vedette Congolaise en fait une spécialité. D’ailleurs, lorsque l’on écoute les premières mesures des morceaux de Franco, force est de remarquer de suite ce style devenu son identité qui n’échappe point à l’homme de la rue.
Franco enregistre chez Papa Dimitriou un producteur Grec sa première chanson au sein de la formation Waton dirigée par Dewagnon et le succès n’est pas au rendez-vous. Franco accompagne de nombreux artistes parmi lesquels Wendo Sor pour parfaire sa carrière musicale. Luambo s’enrichit en faisant beaucoup de variétés musicales et aussi pour s’ouvrir à d’autres horizons. Dans cette nouvelle avanture l’artiste croise Bowané un guitariste célèbre qui accompagne Wendo Sor dans Marie Louise. La collaboration avec Bowané permet à Franco d’enregistrer » Bolingo na ngaï Béatrice « , titre qui lui donne une notoriété auprès des Congolais. Lorsque Bowané part évoluer en Angola, Franco monte en compagnie des artistes Congolais de Brazzaville ( Essous Jean Serge, Landu Rossignol, Pandi Saturnin et Daniel Loubelo dit De la Lune ) l’OK Jazz. Le propriétaire du bar Dancing » Che Cassien » du non d’Oscar Kashama devient le mécène de la nouvelle formation. D’où l’appellation de l’OK Jazz pour faire allusion et remercier O = Oscar K= Kashama pour le soutien matériel et financier qu’il apporte aux jeunes talents.
En 1957 l’orchestre connaît une scission pour des raisons de rivalités entre les Congolais de Brazzaville et de Kinshasa. Le chef de fil de Brazzavillois Jean Serge Essous va monter Rocka – Mambo avec ses compatriotes Pandi Saturnin, Daniel Loubelo et Rossignol. L’OK Jazz est destructuré et Franco engage deux autres Brazzavillois réputés dans les variétés, notamment la musique Cubaine à la mode à cette époque. C’est ainsi que les chanteurs Nganga Edo et N’kouka Célestin viennent sauver les meubles du groupe de Franco. L’OK Jazz rencontre un grand succès avec » Aimé wa bolingo « , » Joséphine » et Motema na ngaï épaï ya mama » tubes chantés par les Brazzavillois du groupe.
En 1958 franco est arrêté par la police coloniale Belge et l’artiste est condamné pour une peine de prison. Un guitariste Kinois dénommé Bolhen remplace le tôlier et les Brazzavillois profittent d’une part de l’absence de leur chef d’orchestre et de la préparation de l’indépendance pour rentrer et monter une formation dans leur pays. C’est ainsi que Essous Jean Serge, Pandi Saturnin, Daniel Loubelo, Landu Rossignol, Célestin N’kouka et Nganga Edo fondent en 1959 Bantou de la Capitale à Brazzaville. Lorsque Franco est libéré en 1959 Vicky Longomba qui est l’un de chanteur fidèle à son chef le soutien dans l’engagement des nouveaux artistes parmi lesquels Simaro, Mujos et Kwami un Congolais de Brazzaville qui se distingue par son joli timbre vocal. Entre 1960 et 1963 l’OK Jazz connaît un grand succès, surtout avec des œuvres chantées par Mujos, dans un Espagnol bricollé avec des phrases simples qui reviennent à chaque fois. » Mi amor, yo te quiero … « .
Entre 1964 et les années 70 une vague d’artiste dont Verkys, les Brazzavillois Youlou Mabiala et Michel Boyi banda viennent renforcer le groupe et lui apporte une autre dimension avec les tubes » Yamba ngaï na léo » et » Mboka mopaya passi « . Puis, Franco et l’OK Jazz atteignent le paroxysme de leur Art dans les années 80 avec des chansons à succès devenus populaires. » Kéba na matraque » ; » Na bali misère » ; » Mouzi » ; » Mamou » et » Mario « . le tube » Mario » fait de Franco un avocat défenseur des femmes du fait qu’à travers ce titre l’artiste raconte non seulement les malheurs d’une femme, mais dénonce par cette occasion des jeunes appelés » gigolos » qui vivent aux dépens de riches et vieilles femmes.
L’orchestre s’installe à partir de 1982 entre Bruxelles et Paris et Franco tombe malade et meurt à Bruxelles le 12 octobre 1989. Simaro Lutumba prend la direction de l’orchestre et un différent éclate avec la famille du défund qui impose sa volonté au nouveau chef d’orchestre. Simaro part avec des fidèles fonder Bana Ok qui peine à connaître un succès. Youlou Mabiala l’un des fils spirituels de Franco qui épouse l’une ses filles reprend la direction du groupe et éprouve des difficultés à faire décoller l’OK Jazz. Youlou tombe gravement malade lors d’une tournée à Pointe Noire à Brazzaville et se fait évacuer en France où il continue une longue convalescence. Force est de constater que personne n’arrive à gérer l’OK jazz de Franco après sa mort. Selon l’un des fidèles avant de mourir Franco lui raconte ceci : » avant de mourir, je vais écrire le nom de mon groupe sur un bout de papier, je vais le bouffer avant le Kouanga ( manioc du pays) et puis, je bois un grand verre de bière pour tout avaler « . Cette histoire drôle et utopique veut dire beaucoup de choses. En fait, Franco veut dire qu’il partira tout simplement avec le nom de sa formation parce qu’il ne pense pas qu’un artiste digne pourra gérer ce patrimoine culturel. Non seulement Franco laisse un vide difficile à combler, mais l’artiste aura marqué trente années durant la vie musicale Africaine. De ce fait, Luambo contribue à l’histoire de la musique de son pays et du continent.
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Sultan Zembellat
Anthologie de la Musique Centrafricaine